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CORINNE OU L’ITALIE.

mère proscrivit aussi ses cendres. Il habita long-temps à Bayes, au milieu des souvenirs de son forfait. Quels monstres le hasard rassemble sous nos yeux ! Tibère et Néron se regardent.

Les îles que les volcans ont fait sortir de la mer servirent, presqu’en naissant, aux crimes du vieux monde ; les malheureux relégués sur ces rochers solitaires, au milieu des flots, contemplaient de loin leur patrie, tâchaient de respirer ses parfums dans les airs, et quelquefois, après un long exil, un arrêt de mort leur apprenait que leurs ennemis du moins ne les avaient pas oubliés.

Oh ! terre, toute baignée de sang et de larmes, tu n’as jamais cessé de produire et des fruits et des fleurs ! es-tu donc sans pitié pour l’homme ? et sa poussière retourne-t-elle dans ton sein maternel sans le faire tressaillir ? »

Ici, Corinne se reposa quelques instans. Tous ceux que la fête avait rassemblés jetaient à ses pieds des branches de myrte et de laurier. La lueur douce et pure de la lune embellissait son visage ; le vent frais de la mer agitait ses cheveux pittoresquement, et