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« Grand Quartier Général, 2e Bureau, 8 mars 1915.

« Les armées allemandes ne peuvent plus augmenter ni en nombre, ni en qualité. Elles sont condamnées à décroître.

« Leurs pertes, y compris les malades, dépassent dès maintenant 3 millions d’hommes. Leurs cadres sont épuisés. Leurs canons sont usés. Beaucoup de leurs obus n’éclatent pas. Les soldats en ont fait l’expérience (sic). Leurs recrues, à l’exercice, n’ont qu’un fusil pour trois hommes…

« Leur ravitaillement en matériel de guerre, déjà difficile, va devenir impossible. La population est étroitement rationnée. La Turquie est menacée dans sa capitale. La Grèce et la Roumanie sont sous les armes, prêtes à marcher avec nous. Les Serbes ont chassé les Autrichiens de leur territoire. Les cuirassés allemands n’osent pas sortir de leurs ports. Quant aux sous-marins, nous en avons coulé, nos alliés et nous, plus qu’ils n’ont torpillé de bateaux de commerce… »

Etc., etc… Il y en a comme cela tout un placard.

C’est à des fariboles de ce genre que se livrait l’Etat-major pour préparer ses offensives au lieu de remplir les besognes de son métier.

Il a fallu, pour que quelque chose changeât dans les méthodes, qu’il arrivât à la tête de l’armée un homme dont je ne suis pas ici pour faire l’éloge — je n’entends faire l’éloge d’aucun général — mais dont je suis bien obligé de reconnaître qu’il est le seul, parmi les grands chefs, à avoir compris quelque chose au caractère de la guerre moderne. C’est le général Pétain. Je possède un exemplaire, assez rare pour les profanes, du rapport qu’il rédigea pour ses supérieurs le 1er novembre 1915, à la suite de l’attaque de Cham-