Page:De la Mennais - De la religion, 1826.djvu/297

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Qu’on donne tant qu’on voudra le nom de préjugé à ce sentiment universel, qu’on le déclare opposé à la raison, quelque chose de plus fort que cette raison philosophique l’emportera toujours sur ses vaines spéculations ; et peut-être, au lieu de combattre cet invincible sentiment, vaudroit-il mieux y reconnoître une loi de la nature morale, pour en tirer, comme des autres lois, des conséquences utiles à l’humanité. Il ne faut pas commencer par nier l’homme, si l’on veut le servir.

Mais le caractère des esprits de ce temps est de s’élever au-dessus de l’expérience, de rêver des êtres abstraits et des lois abstraites, auxquelles on s’efforce ensuite de plier le monde réel. Des gens ont imaginé de démolir la maison de leur père pour la rebâtir dans les nues, et ils s’étonnent d’être entourés de ruines.

Chez les peuples modernes spiritualisés par le christianisme, nourris de dogmes plus développés, de vérités plus fécondes, les croyances ont été aussi plus que jamais le fonds de la vie humaine et de la vie sociale, le lien des hommes et le lien des nations. Partout où s’est étendue son influence, il a renouvelé la société, et déposé dans son sein le germe d’une civilisation inconnue jusqu’alors. Si l’on excepte la nation juive, la révélation primitive et le culte divin ne s’étoient nulle part conservés purs de tout mélange d’erreur et de