Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/190

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merveille. Pendant qu’ils dansaient, je me retirai, laissant une dame pour répondre en mon lieu et dire que j’allais revenir immédiatement. Au bout de moins d’une demi-heure, j’étais de retour, vêtue d’un costume de princesse turque. J’avais eu ce vêtement à Legborn, quand mon prince étranger m’avait acheté une esclave turque, comme je l’ai dit. Le navire de guerre maltais avait, semble-t-il, pris un vaisseau turc allant de Constantinople à Alexandrie, sur lequel se trouvaient quelques dames à destination du Grand-Caire en Égypte. Les dames ayant été faites esclaves, leurs beaux costumes avaient été ainsi exposés en vente, et avec l’esclave turque j’avais en même temps acheté les riches habits.

Le costume était réellement d’une beauté extraordinaire. Je l’avais acheté comme curiosité, n’en ayant jamais vu de pareil. La robe était d’un fin damas de Perse ou de l’Inde, à fond blanc, avec des fleurs bleu et or et une queue de cinq yards[1]. L’habit de dessous était une veste de même étoffe, brodée d’or, et garnie de perles dans le tissu, avec quelques turquoises. À la veste était attachée une ceinture large de cinq à six pouces, à la mode turque, et aux deux extrémités où elle se réunissait ou s’agrafait, il y avait une garniture de diamants de huit pouces de chaque côté. Seulement ce n’étaient pas de vrais diamants, mais personne que moi n’en savait rien.

La coiffure, ou turban, se redressait au sommet, mais sans dépasser cinq pouces, avec un morceau de taffetas léger qui en pendait librement. En face, juste au dessus du front, se trouvait un beau joyau que j’y avais ajouté.

Ce costume tel que je l’ai décrit, m’avait coûté environ soixante pistoles en Italie ; mais il coûtait davantage dans le pays d’où il venait. Je ne pensais guère, quand je l’achetai, que je le mettrais à un tel usage, bien que je l’eusse revêtu maintes fois avec l’aide de ma petite turque, et plus tard avec Amy, seulement pour voir quel air j’avais là dedans. J’avais envoyée celle-ci d’avance pour le préparer, donc lorsque j’arrivai, je n’eus rien à faire qu’à le glisser sur moi, et au bout d’un peu plus d’un

  1. Mesure anglaise qui vaut 914 millimètres. (N. D. T.)