Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/298

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plexité. Mais ce qui en causait le plus à Amy c’est que la fille (ma fille à moi) lui avait dit qu’elle (c’est-à-dire moi, sa mère) était partie avec le joaillier, et pour la France. Elle ne l’appelait pas le joaillier, mais le maître de la maison, lequel, après que sa mère était tombée dans la misère, et qu’Amy avait emmené tous ses enfants loin d’elle, lui avait montré beaucoup d’attention, et l’avait ensuite épousée.

En résumé, il était clair que la fille n’avait que des détails incohérents sur les choses, mais qu’elle possédait cependant des renseignements ayant un fond de réalité ; de sorte qu’à ce qu’il semblait, nos premières dispositions et mon amour avec le joaillier n’étaient pas si cachés que je l’avais cru ; cela avait, sans doute, transpiré jusqu’à ma belle-sœur qui avait fait quelque scandale à ce propos, je suppose ; mais la chance avait voulu qu’il fût trop tard ; j’avais déjà déménagé et étais partie, personne ne savait où ; sans quoi elle m’aurait renvoyé tous les enfants, à coup sûr.

Nous comprîmes cela par les discours de la fille, c’est-à-dire Amy le comprit peu à peu. Mais ce n’était que des fragments d’histoire sans suite, que la fille avaient entendus il y avait de cela si longtemps qu’elle ne pouvait guère y rien comprendre elle-même, si ce n’est, en somme, que sa mère avait fait la catin, était partie avec le gentleman propriétaire de la maison, qui l’avait épousée, et qu’elle était allée en France. Et, comme elle avait appris dans ma maison, quand elle y était servante, que Mrs Amy et sa maîtresse, Lady Roxana, avaient été en France toutes les deux, elle mettait toutes ces choses ensemble, et les rapprochant de la grande bonté qu’Amy lui témoignait maintenant, la pauvre créature se persuadait que celle-ci était réellement sa mère ; et il fut pendant longtemps impossible à Amy de la convaincre du contraire.

Mais lorsque j’y eus réfléchi, autant que je pouvais le faire d’après ce que je saisissais dans les rapports d’Amy, ceci ne m’inquiétait pas la moitié tant que le fait que la jeune péronnelle eût, après tout, retenu le nom de Roxana, qu’elle sût qui était Lady Roxana, et le reste ; bien que ces notions ne se tinssent pas non plus, car alors elle n’aurait pas fixé son espoir sur Amy