Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/361

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« Débarrassée ! certes, lui dis-je ; si j’étais débarrassée d’elle honnêtement et honorablement ; mais je ne sais pas ce qu’Amy peut avoir fait. Assurément, elle ne l’aura pas fait disparaître ?

» — Oh ! fi ! dit ma Quakeresse. Comment peux-tu entretenir une telle pensée ? Non, non. La faire disparaître ! Amy n’a rien dit de semblable. J’ose dire que tu peux être tranquille là-dessus. Amy n’a rien de semblable en tête, j’ose le dire, répéta-t-elle, et elle en chassait, pour ainsi dire, la pensée de mon esprit.

Mais cela ne suffisait pas. L’idée m’en courait continuellement dans la tête ; nuit et jour je ne pouvais penser à rien autre. Et cela m’inspirait une telle horreur pour cet acte et une telle aversion pour Amy que je regardais comme l’assassin que, pour ce qui était d’elle, je crois que si je l’avais vue, je l’aurais certainement envoyée à Newgate ou dans quelque lieu pire, sous cette accusation ; en vérité, je crois que je l’aurais tuée de mes mains.

Quant à la pauvre fille, elle était toujours devant mes yeux ; je la voyais nuit et jour ; elle hantait mon imagination, si elle ne hantait pas la maison ; mon esprit me la montrait sous cent formes et cent aspects ; que je fusse endormie ou éveillée, elle était avec moi. Quelquefois, je croyais la voir la gorge coupée ; quelquefois, la tête coupée et la cervelle écrasée ; d’autres fois, pendue à une poutre ; une autre fois enfin, noyée dans le grand étang de Camberwell. Toutes ces visions me terrifiaient au plus haut point ; et ce qui était pire encore, je ne pouvais réellement pas avoir de ses nouvelles. J’envoyai chez la femme du capitaine, à Redriff, et elle me répondit qu’elle était allée chez ses parents à Spitalfields. J’y envoyai ; ils dirent qu’elle y avait été il y avait environ trois semaines, et qu’elle était partie en voiture avec la dame qui avait coutume d’être si bonne pour elle ; mais ils ne savaient pas où elle était allée, car elle n’était plus revenue. Je renvoyai le commissionnaire pour demander qu’on lui décrivît la femme avec laquelle elle était partie ; et ils la décrivirent si parfaitement, que je sus que c’était Amy et personne autre qu’Amy.

J’envoyai de nouveau dire que Mrs Amy, avec qui elle était