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MOLL FLANDERS

chands de dentelle qui voyagent toujours sur cette route avaient été détroussés aussi. Pour ce qui est des trois gentilshommes, je remettrai à expliquer l’affaire plus tard.

Eh bien, cette alarme nous retint encore une journée, bien que mon époux m’assurât qu’il était toujours beaucoup plus sûr de voyager après un vol, parce qu’il était certain que les voleurs s’étaient enfuis assez loin, après avoir alarmé le pays ; mais j’étais inquiète, et en vérité surtout de peur que ma vieille connaissance fût encore sur la grand’route et par chance me vît. Je ne passai jamais quatre jours d’affilée plus délicieux dans ma vie : je fus jeune mariée pendant tout ce temps, et mon nouvel époux s’efforçait de me charmer en tout. Oh ! si cet état de vie avait pu continuer ! comme toutes mes peines passées auraient été oubliées et mes futures douleurs évitées ! mais j’avais à rendre compte d’une vie passée de l’espèce la plus affreuse, tant en ce monde que dans un autre.

Nous partîmes le cinquième jour ; et mon hôte, parce qu’il me voyait inquiète, monta lui-même à cheval, son fils, et trois honnêtes campagnards avec de bonnes armes à feu, et sans rien nous dire, accompagnèrent le carrosse, pour nous conduire en sûreté à Dunstable.

Nous ne pouvions faire moins que de les traiter très bravement à Dunstable, ce qui coûta à mon époux environ dix ou douze shillings, et quelque chose qu’il donna aux hommes pour leur perte de temps, mais mon hôte ne voulut rien prendre pour lui-même.

C’était là le plus heureux arrangement qui se pût rencontrer pour moi ; car si j’étais venue à Londres sans être mariée, ou bien il m’aurait fallu aller chez lui pour l’en-