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Page:Defoe - Moll Flanders, trad. Schowb, ed. Crès, 1918.djvu/70

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MOLL FLANDERS

frère aîné, mais qu’elle est amoureuse ; peut-être qu’elle est amoureuse de soi-même : il paraît que mes sœurs ont cette opinion.

— Je voudrais bien qu’elle fût amoureuse de moi, dit Robin, je la tirerais vite de peine.

— Que veux-tu dire par là, fils ? dit la vieille dame ; comment peux-tu parler ainsi ?

— Mais, madame, dit encore Robin fort honnêtement, pensez-vous que je laisserais la pauvre fille mourir d’amour, et pour moi, qu’elle a si près de sa main pour le prendre ?

— Fi, mon frère, dit la sœur puînée, comment peux-tu parler ainsi ? Voudrais-tu donc prendre une créature qui ne possède pas quatre sous vaillants au monde ?

— De grâce, mon enfant, dit Robin, la beauté est une dot et la bonne humeur en plus est une double dot ; je te souhaiterais pour la tienne le demi-fonds qu’elle a des deux.

De sorte qu’il lui ferma la bouche du coup.

— Je découvre, dit la sœur aînée, que si Betty n’est pas amoureuse, mon frère l’est ; je m’étonne qu’il ne s’en soit pas ouvert à Betty : je gage qu’elle ne dira pas NON.

— Celles qui cèdent quand elles sont priées, dit Robin, sont à un pas devant celles qui ne sont jamais priées de céder, et à deux pas devant celles qui cèdent avant que d’être priées, et voilà une réponse pour toi, ma sœur.

Ceci enflamma la sœur, et elle s’enleva de colère et dit que les choses en étaient venues à un point tel qu’il était temps que la donzelle (c’était moi) fût mise hors de la famille, et qu’excepté qu’elle n’était point en état d’être