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UNE DIRECTION î LE POSITIVISME 59

coup, et de plus en plus. Le catholicisme athée de Jules Soury est une position absurde. Si je n'avais approché rémouvante sincérité de cette âme bizarre et malheureuse, bourrelée par un effroyable pessi- misme, je dirais que ce ne peut être qu'une atti- tude.

Comte écrivait à sa sœur Alix, fervente catho- lique, le 26 janvier 1849 5 « Il existe déjà Un grand nombre d'esprits, dans toutes les classes de la so- ciété, pour lesquelles les croyances théologiqùes ont perdu tout emprise, et cette classe tend à s'accroître chaque jour. C'est là un fait évident, que personne aujourd'hui ne saurait contester. Or mes travaux ne s'adressent directement qu'à de tels esprits, pour les tirer de la dangereuse anarchie qu'y produit la chute des anciennes convictions que je m'efforce de réparer en érigeant des convictions nouvelles... Car enfin, faut-il donc que, par suite de l'impuissance de la religion proprement dite sur de telles intelli- gences, on les laisse dépourvues de toute culture morale, et discipiinables seulement par les moyens matériels? Ce ne serait pas plus prudent que chari- table. Qu'on me laisse donc moraliser et discipliner librement, parla saine philosophie, ceux qui ne lais- sent plus aucune prise aux procédés théologiques. »

Dans une autre lettre à la même, il blâme tout prosélytisme « indiscret ou déplacé, qui ne pourrait être que nuisible ». Et il ajoute : « Dans la déplo- rable anarchie où notre vie doit s'accomplir, chacun n'a qu'une seule manière vraiment noble et heureuse de tendre au triomphe légitime de ses propres prin- cipes : c'est de remplacer des discussions stériles ou dangereuses par une concurrence active et salutaire.