Page:Deherme - Le Pouvoir social des femmes.djvu/26

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rait celle que M. L. de Beaufrout énonça un jour, alors qu’il était espérantiste : « L’idiome international seul peut rapprocher les esprits. » On voit surtout qu’il commence par diviser ces utopistes.

Ce sont les mots les plus grossiers que les peuples s’empruntent d’abord, et leurs vices. Au reste, plus ils peuvent se parler, plus ils se haïssent. Voyez les populations des frontières. Les Anglais n’ont pas de plus farouches ennemis que les Hindous à qui ils ont enseigné leur langue. Dans l’état des choses actuel, en France, on souhaiterait plutôt la résurrection des patois qui, jadis, séparaient les provinces et les préservaient des contaminations morales par cette sorte de cordon sanitaire. On souhaiterait même l’institution de dialectes de classes. Il est à remarquer que le pays le plus tranquille est la Suisse qui a quatre langues pour trois millions d’habitants.

Vraiment, on ne saurait considérer comme un réel progrès, un progrès bienfaisant, que le Bas-Breton puisse participer aux disputes politiciennes et chanter en français, en argot, sinon en espéranto, l’Internationale, d’immondes obscénités ou J’ai engueulé l’patron. Qui donc se réjouirait que Max Stirner, Bakounine et F. Nietzsche soient mis à la portée de nos Bonnot et Garnier ? Il est absurde, comme on le répétera avec A. Comte, « d’espérer la langue universelle en laissant prévaloir des croyances divergentes et des mœurs hostiles ».