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plus important de ses écrits originaux est la relation de son voyage en France, où nos mœurs et nos usages sont jugés avec assez d’impartialité et où la révolution de juillet se trouve racontée et expliquée avec une très-grande justesse de vue.

En 1852, toutes les écoles furent supprimées par Abbas-Pacha, l’indigne successeur de Méhémet-Aly, et Rifaat fut envoyé en exil dans le Soudan. Mais on colora cet acte barbare du titre spécieux de mission. Rifaat était chargé de fonder des écoles dans ce pays à moitié sauvage. Il y resta jusqu’à l’avènement de Saïd-Pacha, qui rétablit les écoles et rappela les professeurs. Quelques-uns de ces infortunés, privés de la paye qui faisait leur seule ressource, s’étaient adonnés pour gagner leur vie à des travaux manuels ; les uns s’étaient faits tailleurs, les autres cordonniers, d’autres domestiques. Un tel exemple, on en conviendra, n’a pas dû encourager les Égyptiens à embrasser la carrière des lettres.

Rifaat-Bey me fait asseoir à côté de lui sur son divan, m’offre une pipe et le café d’usage, me parle de ses amis de Paris, puis me donne sur sa personne les détails biographiques que je viens de reproduire. En nous quittant, nous prenons jour pour aller ensemble à l’École militaire, qui remplace l’ancienne École des langues.

Un beau matin, on vient m’annoncer que Rifaat-Bey m’attend, à cheval, à la porte de l’hôtel. J’enfourche un âne et nous partons. Nous traversons les rues étroites et populeuses du Mouzki (le quartier franc), les unes couvertes d’une toiture grossière qui les garantit du soleil, les autres ornées de la plus belle des tentures : un ciel limpide et bleu comme le saphir. Nous grimpons la côte qui mène à la citadelle et nous arrivons devant un grand bâtiment badigeonné en blanc. C’est le local de l’École.

L’École militaire se compose de cinq classes. Les branches qu’on y enseigne sont : la langue arabe, la langue turque, la persane, la française, l’allemande et l’anglaise, la