étaient tombés au pouvoir des maréchaux de la Meilleraie et Duplessis, et le 17 décembre, non-seulement vous aviez pardonné aux Barberins, mais vous aviez fait lever le séquestre de dessus leurs biens. Tenez, ajouta Olimpia en tirant de la liasse un papier qu’elle présenta au pape, voyez si je me trompe. »
La feuille tomba sur les genoux d’Innocent, qui n’y porta ni les mains ni les yeux.
« Sœur ! vous m’accablez, dit-il à voix basse.
— Moi ? Pamphile, s’écria dona Olimpia en se rapprochant avec vivacité de son beau-frère, dont elle prit les mains dans les siennes, moi, vous accabler ? moi, chercher à vous faire de la peine ? vous ne pouvez le croire. Ah ! frère ! ajouta-t-elle en se penchant vers lui de dessus le siége sur lequel elle s’était replacée, l’expérience a bien dû vous prouver que toutes les actions de ma vie, depuis que je vous connais, n’ont eu d’autre but que de contribuer à votre bonheur et à votre prospérité. Jamais amitié n’a été plus sincère, plus forte et plus constante que celle que je vous porte, et l’inflexibilité même des raisonnements que j’ai cru devoir choisir pour vous convaincre, est la preuve que l’attachement que je vous ai voué n’est rien moins qu’ordinaire. »
Cette femme avait l’éloquence de la passion, et c’était moins encore ses paroles que la manière dont elle les laissait échapper de ses lèvres, qui lui donnait une puissance irrésistible. Tout en parlant, elle pressait les mains et les genoux tremblants du pape, et lorsqu’elle eut prononcé les derniers mots, elle resta la tête portée en avant et le regard fortement dirigé sur celui du pontife, en laissant lire à la fois sur son visage tout ce que l’espérance et la crainte, se disputant le cœur d’une créature humaine, peuvent faire naître de trouble et d’anxiété.
La passion rajeunit momentanément, et cette fois elle fit resplendir la physionomie de dona Olimpia d’une incomparable beauté.
Le pape éprouva une émotion qu’il ne put dissimuler. Elle s’accrut encore lorsque Olimpia, à qui cette circonstance n’était point échappée, laissa percer un rayon de joie et d’espérance par le plus doux sourire.