— J’ai, ajouta-t-il, mes préparatifs à faire, et le temps qui me reste suffira à peine. Si monsieur de Thiézac veut bien me charger de ses commissions pour Paris, je me trouverai heureux de lui donner en cela, comme en tout autre occasion, la preuve de ma reconnaissance. Recevez donc mes adieux, continua-t-il en promenant son regard sur tous les assistants, et permettez-moi de les faire courts... Vous m’approuvez sans doute, ma cousine, dit-il presque bas à mademoiselle de Liron, en lui baisant la main qu’il effleura à peine ; je pourrais pleurer et je ne serais encore qu’un enfant.
Il embrassa de nouveau son oncle, invita M. de Thiézac à lui envoyer ses lettres, et sortit enfin, laissant les trois personnages présents fort diversement surpris de tout ce dont ils venaient d’être témoins.
Il demeurèrent assez longtemps comme muets. Mais M. de Liron ne put bientôt plus se contenir.
— Savez-vous, monsieur de Thiézac, s’écria-t-il tout à coup, que ce garçon-là a l’âme d’un Caton ?...
Mais personne ne répondit à cette apostrophe. Après quelques minutes, mademoiselle de Liron, qui sentait que ses pleurs allaient couler, se retira chez elle, et M. de Thiézac prit le prétexte des lettres, pour suivre cet exemple.
Le reste de cette journée, dont le commencement avait été si vif, fut, en apparence au moins, excessivement calme. Mademoiselle de Liron ne sortit de sa chambre que pour avoir l’air de surveiller les récoltes qui s’achevaient. M. de Thiézac resta chez lui pour se reposer, disait-il, et M. de Liron passa le temps dans son grand fauteuil, comme à l’ordinaire. Du reste, les repas furent silencieux. On ne dit pas un seul mot du projet de mariage, et personne n’osa même prononcer le nom d’Ernest. Tout le monde avait l’air grave, soucieux, et au silence que chacun observait, il eût été facile pour un témoin froid de juger que tout n’était pas fini. C’était le calme qui précède la tempête.
À onze heures, M. de Thiézac souhaita le bonsoir à ses hôtes et regagna le corps de logis qu’il habitait. Un orage court, succédant à la grande chaleur de la matinée, avait donné quelque fraîcheur à l’air de la nuit. M. de Liron et