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chambre de leur fille. Ils la trouvèrent dormant d’un sommeil profondément tranquille, et remarquèrent avec plaisir que sa physionomie portait l’empreinte d’une joie douce et paisible.

— S’est-elle réveillée ? demanda madame de Soulanges à la femme de chambre.

— Pas une seule fois depuis que vous l’avez quittée, madame ; elle n’a pas même changé de position : elle a le sommeil d’un ange.

Ces derniers mots firent impression sur les parents ; ils avaient eu la même pensée en regardant dormir leur fille. On fit mille recommandations à la personne chargée de la garder pendant la nuit, et madame de Soulanges lui ordonna de venir l’avertir chez elle dans le cas où Louise se réveillerait.

La nuit s’écoula dans le plus grand calme, et tout le monde, excepté la personne chargée de veiller auprès de mademoiselle de Soulanges, goûta le repos le plus parfait.

À quatre heures du matin madame de Soulanges s’éveilla en sursaut, impatiente de voir sa fille, qu’elle trouva elle-même levée, habillée, et faisant sa prière auprès de son lit, devant sa croix. D’un coup d’œil seulement et sans proférer un mot, pour ne point interrompre Louise, elle reprocha doucement à la femme de chambre de ne pas l’avoir avertie. Mais à ce moment, Louise, qui finissait de prier, fit le signe de la croix, se leva avec calme, et dit en se tournant vers sa mère :

— Pardonnez-moi, et ne grondez pas Julie de ce qu’elle n’a pas exécuté vos ordres. Je me sentais bien, j’ai pensé que vous aviez assez besoin de repos pour que je prenne sur moi de faire respecter votre sommeil.

En parlant ainsi, elle prit la main de sa mère qu’elle baisa respectueusement, et lui donna le bonjour en recevant en échange un baiser plein de tendresse sur le front.

Non-seulement mademoiselle de Soulanges était entièrement remise de la fatigue de la veille, mais elle se sentait même dans un état de santé où elle ne s’était point trouvée jusque-là. Son teint clair, brillant, donnait un éclat extraordinaire à sa physionomie ; et l’expression de ses yeux, de-