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Quand son voile fut posé, sa mère la fit asseoir pour la remettre du malaise que donnent toujours des habits qui n’ont point encore été portés, et se plaça auprès d’elle. Après quelques minutes de silence, Louise voulant se rapprocher de sa mère, s’aperçut, par l’obstacle que lui présenta son voile, que l’on venait de l’habiller. Après avoir jeté un coup d’œil rapide sur son ajustement, et témoigné par un léger sourire sa reconnaissance de tous les soins que l’on avait pris pour elle, elle se laissa tomber à genoux devant sa mère, en lui disant :

— Ma mère, donnez-moi votre bénédiction !

Un attendrissement profond fit couler les larmes de madame de Soulanges.

— Ma mère, ajouta Louise en tenant le regard baissé, mon inconcevable erreur a longtemps jeté l’amertume dans votre âme. Depuis un mois je demande pardon à Dieu de vous avoir si inhumainement blessée, mais veuillez intercéder pour moi auprès de lui. Vous, ô ma mère ! pourrez sans doute obtenir cette grâce insigne de lui faire supporter la présence de votre enfant. Avant de partir, répétez-moi que je ne vous inspire plus de défiance ; que cet être brut et sauvage qui naguère encore ignorait son Dieu, le comprend, l’aime, l’adore assez aujourd’hui, pour qu’il ne soit pas ignominieusement repoussé de devant lui ! Ô ma mère ! que ce soit vous qui m’assuriez que par l’acte que je vais faire, je ne risque pas d’offenser Dieu et d’attirer sur moi sa juste colère !

Louise était toujours à genoux, tenant la tête baissée comme une coupable qui attend son arrêt.

— Louise... mon enfant, lui dit enfin sa mère d’une voix altérée, et en la faisant relever, non-seulement je m’empresse de te donner ce pardon que tu crois devoir demander, mais je te remercie de la joie que tu me donnes aujourd’hui. Viens, viens, empressons-nous d’aller à l’église. J’y serai près de toi ; c’est moi qui, fière de mon enfant, la conduirai jusqu’au pied de l’autel.

Ces paroles firent relever la tête à Louise. Elle porta sur sa mère un regard plein de reconnaissance, et dit en lui prenant la main : — Allons !