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xxiii
DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

En effet, le Saint-Office rendit le décret annoncé par l’ambassadeur : Galilée n’y était pas nommé ; le cardinal Bellarmin avait même consenti à lui donner une attestation de laquelle il résultait qu’il n’avait été forcé à aucune abjuration, et qu’il avait bien moins encore été condamné à des pénitences salutaires, mais que seulement on lui avait signifié la sentence du Saint-Office.

En conséquence du rapport fait par l’ambassadeur, le grand-duc fit écrire à Galilée : « qu’il avait pu apprendre par sa propre expérience quel était l’esprit persécuteur des moines ; que leurs altesses craignaient qu’un plus long séjour à Rome ne lui causât quelques désagrémens ; que puisque jusqu’alors il en était sorti avec honneur, il ne fallait plus picoter le chien qui dormait ; qu’il était invité à revenir au plus tôt ; que les moines étaient tout puissans, et qu’il courait sur lui des bruits assez déplaisans. »

Ce que peu de personnes ont remarqué, quoique le fait soit attesté par la première ligne de la sentence qui condamne Galilée, c’est que, dès le commencement de 1615, près d’un an avant l’injonction qui imposait à Galilée le silence le plus absolu sur le système de Copernic, sous peine d’être jeté dans les prisons (conjecerere in carcerem), l’inquisition instruisait déjà contre Galilée. Nous possédons une longue déposition du moine Caccini, de ce fougueux prédicateur qui avait insulté à Galilée en chaire, à Florence même. Cet acte fait partie des pièces du procès de Galilée ; il est du 20 mars 1615 ; le corps de l’acte est en latin ; les réponses du déposant aux interpellations qui lui sont faites sont en italien. Nous avons également en notre possession une lettre du dominicain Lorini, datée de février 1615, et qui dénonce à l’inquisition une lettre écrite le 21 décembre 1613, par Galilée à Benedetto Castelli, son élève, son ami et son suppléant en la chaire de Pise, et dans laquelle il donnait quelques développemens nouveaux à son explication du passage de Josué. On n’avait que des copies de cette lettre, et on aurait voulu avoir la lettre écrite et signée par Galilée. L’archevêque de Pise et l’inquisiteur Lélio se liguèrent, employèrent toute leur adresse et les témoignages d’amitié les plus perfides, pour tirer cet original des mains, soit de Castelli, soit de Galilée lui-même, à qui Castelli disait l’avoir renvoyé. Probablement ils ne purent y réussir, puisque tous leurs efforts se bornèrent alors à des dénonciations et à des procédures secrètes à Rome. Toutes ces menées avaient donc précédé le voyage de Rome, où Galilée eut des succès si brillans, et qui pourtant se terminèrent par cette défense de croire et