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Comme tout le monde

après, les quatre voix du docteur, de la sage-femme, de la mère et du mari annoncèrent ensemble à la pauvre Isabelle exténuée :

— C’est un gros garçon !


Passées les brutalités de l’enfantement, voici notre petite accouchée toute pâle, coquettement allongée parmi des draps et des oreillers brodés, tout au milieu de la chambre bien rangée. Du drame de la naissance il ne reste plus qu’un tableau charmant. La jeune mère, encore pantelante, ne laisse voir de sa personne saccagée qu’une jolie tête, dont la natte fauve est relevée par un nœud de ruban rose, qu’un buste en camisole de soie et dentelles, que deux mains amenuisées par la souffrance. Feu clair dans la cheminée, beau bébé dans le berceau, petite odeur de poudre de riz, profils attentifs penchés sur la jeune mère et sur l’enfant.

Comme récompense à sa longue agonie, Isabelle a eu la joie de sentir se gonfler de lait ses seins jusque-là stériles. Isabelle nourrira « le fils du rêve ».

La tête tournée sur l’oreiller, plongeant ses yeux jusqu’au fond du berceau creux comme un nid, elle enveloppe d’un regard mystérieux ce petit Louis