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Comme tout le monde

pour le mal, implique un intérêt vraiment étrange, quand on songe aux propres ennuis des gens. Peut-être est-ce aussi le goût du théâtre qui les pousse. Ils veulent que les autres, les indispensables Autres, leur donnent la comédie. De la sorte, ils sont, à tour de rôle, acteurs et spectateurs, et la vie en paraît moins monotone.

Donc, madame Léon Chardier, elle, ne s’occupait exclusivement que de ses enfants. C’était connu.

Ses enfants… Les dix-sept ans de mademoiselle Zozo fleurissaient comme une rose, d’essence sans rareté mais très bien venue.

Elle était assez grande, bien proportionnée, étroite de hanches comme les filles de cet âge, avec de beaux cheveux châtain foncé, des yeux gris et rieurs ; et l’éclat de ses joues était une merveille.

Du reste, elle souhaitait d’être pâle, et s’affligeait de son teint vif. Surveillée de près par ses parents, elle ne pouvait réaliser son désir, qui était de se farder, de se friser, de porter des toilettes excentriques. Ces manifestations révèlent l’ivresse intérieure de la gamine devenue femme, et qui voudrait encore exagérer une transformation qui l’étonne et l’enorgueillit. Mademoiselle Zozo est à l’âge effréné. Cet âge passe vite chez les filles bourgeoises ; mais, pour un moment, il leur donne, à moins qu’elles ne soient nées hypocrites