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Page:Delarue-Mardrus - L’hermine passant, 1938.djvu/17

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l’hermine passant

parents. Il avait dix-sept ans. Il en a trente-deux maintenant ; moi, cinquante.

Non seulement je dirige son intérieur, mais ce qui me restait de ma dot est engagé dans ses affaires, et le plus important, je crois, c’est que je l’empêche de faire trop de bêtises car, bambocheur comme il l’est, Dieu sait quelle bonne femme finirait par mettre le grappin sur lui ! Comme un gosse, il me raconte tout, et je suis là pour le mettre en garde contre les femelles trop dangereuses. Car le cher petit est influençable (sans, du reste, s’en douter) autant qu’on peut l’être, j’en sais quelque chose, moi qui le mène depuis quinze ans par le bout du nez.

Mon rêve est de le marier et de le voir père de famille. Je ne serai pas éternelle. Et qui le retiendra sur la pente quand j’aurai disparu ? D’autre part, parmi les demoiselles modernes, où trouver ce qu’il lui faut ? Je le voudrais heureux, naturellement, et stable. Si c’est pour qu’il divorce au bout d’un an, mieux vaut encore qu’il reste garçon.

Tout ce qui tourne autour de lui, pourtant ! Marquis de Bocquensé, ça les tente, les tente… J’ai surtout peur des Américaines.