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« Après tout, ça va très bien comme ça. »

Et, quand elle eut repris la pose, la séance recommença, dans le silence, dans la fumée d’une éternelle cigarette.

Était-il quatre heures et demie ? Harlingues aimait mieux ne pas le savoir. Il prenait bien soin de ne pas regarder l’horloge. Du reste, Mrs Backeray ne manifestait aucune agitation. Il serait toujours temps de lui donner à goûter quand elle le demanderait.

Pose, triste fille ! Tu ne te doué pas que, terminé ton buste, tu pourras saluer pour la dernière fois cet atelier dont tu n’es pas digne, ce sculpteur acharné qui, pourtant, ne veut plus de toi.

— Zut !… dit Harlingues (il dit même autre chose).

On venait de frapper à la porte.

Les mains engluées de terre, il ouvrit.

— Maître !… s’écria Rodrigo.

Ses paroles d’arrivée s’arrêtèrent là. Stupéfait, il regardait tour à tour le sculpteur et le modèle.

— Est-ce vraiment Mrs Backeray ?… s’étrangla-t-il.

— Elle-même !… répondit Harlingues avec un petit rire moqueur.

— Oh ! mais !… Alors quoi ?… Je ne savais pas… Je ne croyais pas…

Le poète brésilien bégaya pendant quelques secondes avant de reprendre ses esprits.

L’Anglaise, ayant tourné la tête, le fixait sans le saluer.

Mrs Backeray ! I am se glad te see you !

Il continua, presque haletant, tout en baisant la main qu’il avait prise. Il devait dire son admiration pour les livres de la poétesse, la joie de l’avoir lue, connue, exprimer avec volubilité tout ce qu’Harlingues avait vu dans sa lettre.