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rédalga

— Quand crois-tu que je pourrai l’avoir ?

Et Jude riait de son impatience.

Peu après, leur première discussion se renouvela.

— Ce n’est pas possible que tu persistes, cher ! Pense ! Je veux un exemplaire unique. Je demanderai même que le moulage soit détruit. Alors ? Tu vois bien qu’il faudra m’obéir ?…

Jude finit par faire remarquer que le modelage n’étant même pas terminé, bien du temps leur restait encore et qu’il était inutile de poursuivre ces débats pécuniaires.

— Tu n’as pas envie d’aller à Bellevue ? Je pourrais t’y emmener le jour que tu voudrais. Tu as peut-être des mesures à prendre ? Nous irions déjeuner là-bas. J’ai toujours la femme de mon jardinier qui ne fait pas mal la cuisine… C’est dommage que Rodrigo soit à Londres… Nous l’aurions emmené.

— Ah !… Il est à Londres ?…

— Oui. Il a une sœur mariée là-bas… À propos, depuis le temps que je ne suis venu (Alvaro se mit à rire) tu n’as pas revu son Anglaise ?

L’instant qu’Harlingues hésita fut si bref qu’il était impossible de le percevoir.

— Non, dit-il.

Et, dès qu’il eut prononcé ce mensonge, il le regretta.

Alvaro ne lui laissa pas le temps de s’appesantir là-dessus.

— Bon ! fit-il en se frappant le front. Que je suis bête ! Je te parle de Bellevue et j’oublie que je dois m’absenter pour une semaine. Un petit voyage en Belgique. Je vais voir un antiquaire de Bruxelles qui m’écrit, et j’en profiterai pour aller dans d’autres villes. Toujours l’installation de mon pied-à-terre… Mais, dès mon retour, nous arrangerons notre déjeuner champêtre, n’est-ce pas ?… Au revoir, Jude. Je ne t’ai pas assez dit !… Ah ! que je suis heureux de ce que tu as fait !