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rédalga

sous un bec de gaz, il posa sa question à l’inconsistant personnage qui somnolait là. Sa voix s’étranglait, ses mains étaient glacées.

— Mâme Backeray, vous demandez ?…

Un coup d’œil au mur.

— Sa clé n’est pas là. Elle n’est pas rentrée.

— Ah !… fit Harlingues.

Et son sang se remit à circuler. |

— Vous pouvez lui laisser un mot… dit l’homme. Voilà du papier et une enveloppe.

Harlingues prit la plume. Ses doigts tremblaient légèrement.

Ce fut seulement au moment de formuler la première phrase : comment lui écrire ? Il était incapable de tracer trois mots d’anglais.

Gêné par le portier en attente, il se sentit grotesque.

— Je vais plutôt vous remettre ma carte, dit-il pour se donner du temps.

La carte était-elle suffisante pour expliquer sa démarche.

Brusquement, il écrivit sur cette carte : Come ! (Venez !)

Et quand l’encre fut séchée, il cacheta :

— Vous lui remettrez ça quand elle rentrera… recommanda-t-il.

— Elle le trouvera bien avec sa clé !… bougonna l’autre. S’il fallait attendre les clients toute la nuit…

Et Jude Harlingues, avec ces mots, sortit.

Au coin de la rue où il passait pour reprendre l’autobus, il eut-envie de retourner à cet hôtel pour écrire autre chose, Come ! c’était trop peu, ou trop.

« Tant pis !… » : murmura-t-il en haussant les épaules.