Aller au contenu

Page:Delarue-Mardrus - Toutoune et son amour.pdf/14

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tée très vite ; et, hors d’haleine, j’ai répété la chose aux garçons. Ils ont répondu : « Bien. Ça fait rien. On jouera tout de même avec toi. »

Voilà le premier fait qui m’ait frappée et qui soit resté net dans mon esprit. Le reste, en ce qui concerne cette toute première période de ma vie, se confond dans des nuées plus ou moins épaisses. Mais dès le berceau, je crois, j’ai senti et j’ai aimé le parfum que porte maman, j’ai discerné, de plus près, l’odeur différente de sa joue poudrée, j’ai compris la douceur des étoffes de ses corsages, et, surtout, j’ai vu, comme un trésor qui brille dans des ombres, la couleur de ses yeux laiteux, et ses cils brillants qu’on dirait toujours mouillés et collés par des larmes.

De cet appartement de Paris où j’avais alors le bonheur de vivre avec mes parents et où j’ai dû rester jusqu’à environ quatre ans, il ne m’est rien resté. Seul, le voyage qui nous ramena ici, au manoir, m’a laissé dans la mémoire quelque chose de saisissa-