— Parbleu !… dit Ludivine, tu dois ôter le cul de la bouteille ! Est bien simple !
— Comme ça s’rait commode !… répondait le mousse.
— Non ! C’est l’goulot qu’on ôte et qu’on remet ! fit la femme Bucaille.
Mais Delphin haussait les épaules en riant.
— Moi, j’sais !… commença le pêcheur. Est dans la bouteille même que tu construis ton navire, avec des pinces.
Mais Delphin secouait la tête.
— Alors, termina Ludivine un peu rageuse, tu souffles d’ssus, et tu pries l’Bon Dieu, et pis v’là tout !
Mais Delphin ne voulut pas dire son secret.
— Quand c’est que tu l’commenceras ?… s’informèrent les petits.
— Quand j’aurai du temps. Me faut d’abord la bouteille,
— Est pas difficile !… s’exclamèrent-ils tous. En v’là eune, si tu la veux !
Il regarda le litre où restait encore un peu du cidre du déjeuner.
— Est pas eune bouteille comme ça !
— Bien sûr !… cria Ludivine, de plus en plus agacée. Est eune bouteille enchantée, qu’tu veux.
Il riposta flegmatiquement :
— Enchantée, non. Mais eune bouteille à huile, oui !
— J’dois avoir ça dans l’bas du buffet, déclara la femme Bucaille.
Et les enfants se précipitèrent.
— En v’là eune !…
Ils la posèrent, triomphants, sur la table.
— Est-y cha ?…
— Ça va ! dit Delphin, plein d’importance,
Il manipula la bouteille de verre blanc, plus courte que les autres, et de goulot plus large,
— Y n’manque pus que l’batiau !… ricana Ludivine.
— Il y s’ra un jour ! Espérez seul’ment un peu !