— Maurice ?… Comme t’es-t-insensé ! Maurice qu’a à peine neuf ans, y remplacerait un novice ? Tu n’prétends pas nous ruiner notre garçon, dis ?… Maurice ? Un p’tit baizot comme lui pour prendre la mer avec toi ? J’en reste jugée !
— Y a des gosses qui sont mousses à s’n’âge. Y n’s’ra ni l’premier ni l’dernier !
— Où qu’t’en as vu, vieux piant, des éfants fichus comme lui, qui n’tient pas debout, où qu’t’en as vu qui faisaient l’service d’un matelot avant même d’avoir pris l’âge d’être mousse ? Attends au moins qu’il ait ses treize ans pour y faire courir le flot, c’méchant gamin ! Et d’abord y n’a pas fini s’n’école !
— Ah ! tais-toi !… J’vais être trop ri, tout à l’heure ! S’n’école ? Y n’y va brin, à s’n’école ! Elle est à la Croix-Rouge ou dans l’Dauphin, ou sous la jetée, s’n’école !
— Est des mentes ! Il y était aujourd’hui !
— Y était-y hier ? Faut pas m’faire prendre du poil de quin pour d’la soie, tu sais ben ?
— Ce que j’te f’rai prendre, est d’la police correctionnelle ! T’as pas l’droit d’l’embarquer avant treize ans. Je t’quitterai pas faire cha ! Est déjà assez qu’notre aîné soit trépassé !
Bucaille venait de reculer comme pour prendre son élan, d’un geste tel que les deux petits garçons se levèrent et que Ludivine fit un pas.
— La police correctionnelle, que t’as dit ?… bégaya-t-il. Répète ça, un peu, et tu vas voir si j’t’entame !
— J’me tairai point !… cria la mère au comble de la rage. Tant que je serai là, tu m’prendras pas mon p’tit gas !
— Je l’prendrai pas ?
— Non !
— Tiens !… attrape toujours ça, vieuille bouée, en attendant !
Ce fut positivement comme à Guignol. Guignol tragique ! Un coup de poing en pleine figure fit tomber la pauvre Bucaille comme