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Page:Delatour - Adam Smith sa vie, ses travaux, ses doctrines.djvu/131

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l’accumulation et sur la distribution de la richesse, de même allons-nous voir la part que prennent les aspects de la nature dans l’accumulation et dans la distribution de la pensée… Les aspects de la nature, considérés à ce point de vue, peuvent se diviser en deux classes : la première classe se compose de ceux qui sont le plus propres à exciter l’imagination ; la seconde, de ceux qui s’adressent à ce que l’on appelle communément l’entendement, c’est-à-dire aux simples opérations logiques de l’intellect… Or, en ce qui concerne les phénomènes naturels, il est évident que tout ce qui inspire des sentiments de terreur ou de grand étonnement, que tout ce qui excite dans l’esprit du vague et de l’irrésistible, a une tendance particulière à enflammer l’imagination et à amener, sous son empire, les opérations plus lentes et plus réfléchies de l’entendement. Dans ces circonstances, l’homme se mettant lui-même en contraste avec la force et la majesté de la nature, éprouve d’une façon pénible la conscience de sa propre insignifiance. Un sentiment d’infériorité s’empare de lui. Son esprit, épouvanté devant l’indéfini et devant l’indéfinissable, cherche à peine à scruter les détails qui composent cette imposante grandeur. D’un autre côté, là où les œuvres de la nature sont mesquines et faibles, l’homme reprend confiance, il semble qu’il soit plus capable de compter sur sa propre force ; il peut, pour ainsi dire, passer outre et faire preuve d’autorité dans toutes les directions. Plus les phénomènes sont accessibles, plus il lui devient facile de les expérimenter ou de les observer minutieusement ; ses dispositions naturelles pour l’investigation et l’analyse se trouvent encouragées, il est tenté de généraliser les aspects de la nature et de les relier aux lois qui les gouvernent. Si l’on examine de cette manière l’esprit humain sous cette influence des aspects de la nature, c’est sûrement un fait remarquable que, toutes les grandes civilisations primitives ont été situées près des tropiques où ces aspects ont le caractère le plus sublime et le plus terrible, et où la nature entoure l’homme, sous tous les rapports, des plus grands dangers…. Les œuvres de la nature, ajoute-t-il plus loin[1], qui, dans l’Inde, sont d’un gran-

  1. Hist. de la Civilisation, I, p. 159.