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Page:Delavigne - Œuvres complètes, volume 4, Didot, 1881.djvu/9

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rivée d’une de ces grandes crises où la Providence renouvelle la face des sociétés et ouvre à l’homme des voies nouvelles de perfectionnement. La France, quoique soucieuse alors pour ses propres libertés, sympathisait ouvertement avec une cause pour laquelle tant de braves gens mouraient ailleurs et pendant que l’autorité s’efforçait de jeter une teinte de ridicule sur des entreprises avortées, et les regardait comme des soulèvements de place publique, qui, n’ayant pas le succès de notre révolution, avaient le tort de paraître la singer, le peuple applaudissait aux tentatives et adoptait les vaincus. C’est que, malgré nos luttes intérieures, l’opinion populaire, forte de l’appui de ses amis et des fautes mêmes de ses ennemis, sure que la liberté briserait à la fin les entraves qui gênaient son développement, entretenait au dehors un besoin d’expansion et de sympathies.

Cet intérêt généreux du peuple, en faveur des mouvements insurrectionnels qui éclataient en Grèce et en Italie, ne pouvait pas échapper au poëte national, qui avait pris pour muse la Liberté. Il pleura sur les malheurs de Naples, mais en mêlant les sévères conseils de la politique aux accents émus du poëte ; et il ne put se défendre d’un sentiment d’ironie amère en voyant ce peuple, qui avait accueilli la liberté dans ses murs et s’était soulevé à son appel, s’enivrer trente jours plus tard avec les Autrichiens au pied du laurier de Virgile. Il pleura aussi sur la Grèce mais, en la voyant si constante et si résignée, il n’eut pour elle que des chants d’amour ; les rois eux-mêmes entendirent sa voix, et jetèrent un moment leur sceptre entre la Grèce et les barbares, afin d’arrêter ces grandes effusions de sang humain.

Ce fut à cette époque que le poète partit pour l’Italie il avait besoin de respirer. Il vint errer sur les ruines du monde romain ; il visita l’Italie, l’insou-