Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/54

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S’éloigne, redescend, croise et confond sa route.
Quelquefois il s’arrête ; il regarde, il écoute ;
Et des chiens, des chasseurs, de l’écho des forêts
Déjà l’affreux concert le frappe de plus près.
Il part encor, s’épuise encore en ruses vaines.
Mais déjà la terreur court dans toutes ses veines ;
Chaque bruit est pour lui l’annonce de son sort,
Chaque arbre un ennemi, chaque ennemi la mort.
Alors, las de traîner sa course vagabonde,
De la terre infidèle il s’élance dans l’onde,
Et change d’élément sans changer de destin.
Avide et réclamant son barbare festin,
Bientôt vole après lui, de sueur dégouttante,
Brûlante de fureur et de soif haletante,
La meute aux cris aigus, aux yeux étincelans.
L’onde à peine suffit à leurs gosiers brûlans :
Mais à leur fier instinct d’autres besoins commandent ;
C’est de sang qu’ils ont soif, c’est du sang qu’ils demandent.
Alors désespéré, sans amis, sans secours,
A la fureur enfin sa foiblesse a recours.
Hélas ! Pourquoi faut-il qu’en ruses impuissantes
La frayeur ait usé ses forces languissantes ?
Et que n’a-t-il plus tôt, écoutant sa valeur,
Par un noble combat illustré son malheur ?
Mais, enfin, las de perdre une inutile adresse,
Terrible, il se ranime, il s’avance, il se dresse,