Page:Delille - Les Jardins, 1782.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Les arbres, les rochers, et les eaux, et les fleurs,
Ce sont là vos pinceaux, vos toiles, vos couleurs ;
La nature est à vous ; et votre main féconde
Dispose, pour créer, des éléments du monde.

Mais avant de planter, avant que du terrein
Votre bêche imprudente ait entamé le sein,
Pour donner aux jardins une forme plus pure,
Observez, connoissez, imitez la nature.
N’avez-vous pas souvent, aux lieux infréquentés,
Rencontré tout-à-coup ces aspects enchantés
Qui suspendent vos pas, dont l’image chérie
Vous jette en une douce et longue rêverie ?
Saisissez, s’il se peut, leurs traits les plus frappants,
Et des champs apprenez l’art de parer les champs.

Voyez aussi les lieux qu’un goût savant décore.
Dans ces tableaux choisis vous choisirez encore.
Dans sa pompe élégante admirez Chantilli,
De héros en héros, d’âge en âge embelli.
Belœil, tout à la fois magnifique et champêtre,
Chanteloup, fier encor de l’exil de son maître,
Vous plairont tour-à-tour. Tel que ce frais bouton,
Timide avant-coureur de la belle saison,