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MÉGABISE.

Tel est Xercès ! Je suis un exemple moi-même
De l’abus que l’ingrat fait du pouvoir suprême.
De son farouche orgueil dont ici tu te plains,
Apprends ce que je souffre, et vois ce que je crains.
Le jour où se livra la bataille fameuse
Aux Persans si funeste, aux Grecs si glorieuse,
J’osai sur le combat lui donner mes avis.
Il eût été vainqueur s’il les avait suivis :
Trop fier pour écouter un conseil salutaire,
Loin d’adopter mon plan à ses projets contraire,
Il aima mieux marcher vers un péril certain,
Que d’avoir à rougir de changer de dessein ;
Il fuit !… Le Grec vainqueur s’attache à sa poursuite,
L’atteint, va l’immoler ; je protège sa fuite.
Le croirais-tu ? Xercès, confus de mes secours,
Ne me pardonne pas d’avoir sauvé ses jours !… (4
Je le vois au conseil éviter mon approche :
Ma vue est de sa honte un éternel reproche.
L’ingrat me haît : j’en ai d’infaillibles garants ;
Je sais trop ce que peut la haine des tyrans.