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Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/33

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d’halifax à québec

des fruits ou des friandises. On peut manger ces petites choses sur une tablette qu’il est facile de faire dresser entre deux banquettes. Dans quelques trains on trouve des wagons-restaurants (dining cars) et des wagons-salons luxueusement aménagés où des fauteuils tournants remplacent les banquettes traditionnelles. Il n’y a que deux classes de wagons, mais les 2e classes correspondent à nos 3e, et les wagons de ler à nos 2e. Les wagons-lits sont les véritables 1er, tant au point de vue du confort que de la société. Un supplément de 2 ou 3 piastres par jour (la piastre ou dollar vaut 5 francs et quelques centimes) donne droit à une place de wagon-lit. Toutes les gares sont ouvertes ; monte en chemin de fer et en descend qui veut et comme il veut, à ses risques et périls. Nulle clôture ne protège la voie que le chasse-pierre, dont est munie chaque locomotive, doit seul déblayer en cas d’encombrement.

Le contrôle se fait en chemin de fer, et il en est ainsi, même pour la visite de la douane, quand on franchit la frontière des États-Unis. En nous rendant de Montréal à New-York, on nous invita tout simplement à passer dans le wagon aux bagages, pendant la marche du train, afin de régulariser, s’il y avait lieu, notre situation.

Grâce à tous ces avantages, les voyages en chemin de fer sont fort agréables ; sans ce confort, généralement inconnu en Europe, les traversées de plusieurs jours consécutifs seraient peu praticables et se changeraient en horribles corvées. Un jour viendra sans doute où le vieux continent, si routinier de sa nature, tiendra à honneur de se mettre au niveau des progrès réalisés dans le nouveau monde.

Le pays traversé par le chemin de fer Intercolonial est fort pittoresque. La baie d’Halifax et le bassin de Bedford se montrent sous tous leurs contours, aux lueurs vives d’un beau coucher de soleil ; puis, après des terrains fraîchement défrichés, apparaissent bientôt d’interminables forêts qui couvrent encore d’immenses espaces dans les provinces de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. Le pin est l’essence dominante, mais au lieu de contempler ces aiguilles vertes variant selon les espèces, le regard ne s’étend trop souvent que sur des myriades de grands troncs noircis par le feu. Ce triste spectacle est le produit de la main de l’homme. L’abondance du bois est telle que sa valeur marchande est nulle, et comme le défrichement serait à la fois et