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Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/52

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AU CANADA ET CHEZ LES PEAUX-ROUGES

les chansons, les épigrammes formaient, à côté d’études historiques sérieuses, le fonds du journal. Ses rédacteurs et ceux du Mercury, organe anglais créé en 1805, se déchiraient à belles dents. Bientôt commencèrent les polémiques que vint alimenter le Courrier de Québec, organe français chouayen, fondé par le juge de Bonne. L’origine du nom de Chouayen remonte au combat de ce nom livré le 14 août 1756. Ce jour-là, plusieurs Canadiens, désespérant du salut de leur cause, inclinèrent du côté de l’armée anglaise, ce qui n’empêcha point la défaite de celle-ci. À partir de ce moment, l’épithète de Chouayens s’appliqua aux transfuges de la race française, à ceux qui, dans les élections, prenaient le parti du gouvernement anglais. Le Courrier de Québec n’eut point de succès ; on lui rendit la vie si dure qu’au bout de six mois il en mourut (2 juin 1807).

Retracer l’histoire du Canadien serait faire celle du Canada lui-même pendant toute la période d’oppression. Saisi à plusieurs reprises par ordre des autorités anglaises, le vaillant journal vit ses presses détruites, ses rédacteurs emprisonnés, mais il ressuscita toujours, reprenant des forces à chaque acte de violence et de persécution. Il put résister à la tourmente de 1837, sous la direction d’Étienne Parent, dont l’influence s’y fit sentir pendant de longues années après cette époque. Vinrent ensuite, comme directeur du journal, M. Hector Fabre ; M. Eventuren, qui était libéral et qui, à ce moment, donna au Canadien une couleur politique de cette nuance ; M. Mac Donald ; M. L.-H. Huot, depuis greffier de la cour en chancellerie, et enfin M. Israël Tarte qui, depuis 1874, n’a pas cessé d’être rédacteur en chef du journal. Six mois après avoir pris la direction du Canadien, M. Tarte en achetait la propriété qu’il revendit, en 1876, àM. Desjardins, lequel la transmit à son tour, en 1879, à M. Demers.

M. Tarte, qui a été, de 1876 à 1882, député provincial pour le comté de Bonaventure, a su donner un grand développement et une grande influence au Canadien et au groupe de journaux qui gravitent dans sa sphère. Il a eu la bonne fortune de s’attacher comme collaborateurs les hommes politiques les plus en vue du parti conservateur de la province de Québec. Sir Adolphe Caron, ministre de la milice, et sir Hector Langevin, ministre des travaux publics, ont eu une part active dans la rédaction du Canadien. de 1875 à 1881. M. Desjardins,