Aller au contenu

Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
montréal

régulier de bateaux à vapeur relie la capitale du Bas Canada à Chicoutimi, terminus de la navigation sur la rivière Saguenay. Ces bateaux à vapeur, à deux étages, comme ceux de la Compagnie Richelieu faisant le service du Haut Saint-Laurent, sont appelés souvent des palais flottants à cause du confort et du luxe qu’on rencontre à bord.

Au sortir du port, on descend le Saint-Laurent en longeant l’île d’Orléans, lieu de plaisance très fréquenté dans la belle saison par les Québecquois et les Québecquoises. Puis le grand fleuve canadien s’élargit tout à coup. Bientôt apparaissent sur la rive gauche l’île aux Coudres et la baie de Saint-Paul, dont les rives escarpées, avec la chaîne des Laurentides à l’arrière-plan, rappellent quelque peu le lac des Quatre-Cantons, puis la station balnéaire de la Malbaie, le Trouville canadien. La rive, tantôt basse, tantôt escarpée, laisse voir de jolies villas émergeant au milieu de gros blocs de rochers qu’entourent de tous côtés des sapins au sombre feuillage. Sur le débarcadère et sur la plage on aperçoit un public élégant, en grande partie féminin, venu de divers points du Canada et même des États-Unis. Les Américains, en effet, fuyant les fortes chaleurs de leur pays, commencent à apprécier de plus en plus les plages canadiennes.

De l’autre côté du Saint-Laurent se trouvent Kamouraska, la Rivière du Loup, Cacouna, et autres stations très fréquentées par les baigneurs. La Rivière du Loup surtout, se pose en rivale, et en rivale heureuse de la Malbaie. Le site est agréable et, comme variante, on y rencontre des Sauvages grandement civilisés qui vendent, à grand renfort de piastres, des bibelots de leur fabrication.

À Tadoussac, où on se livre à l’élevage du saumon, se trouve l’embouchure du Saguenay. Le Saint-Laurent a, en cet endroit, une largeur considérable. De la Rivière du Loup qui se trouve presque en face de Tadoussac, il faut plus d’une heure et demie pour traverser le fleuve. La houle se fait parfois sentir et les cœurs faibles ne sont point à l’abri du mal de mer. Bien plus resserré que le Saint-Laurent, le Saguenay est constamment bordé d’une double ceinture de rochers tantôt escarpés et même à pic, tantôt en pente douce. L’entrée dans ce large couloir est saisissante et le coup d’œil change fréquemment grâce aux sinuosités que décrit la rivière. Mais bientôt la nuit tombe et chacun rentre dans sa cabine.