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Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/66

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AU CANADA ET CHEZ LES PEAUX-ROUGES

d’amitié pour la France. Des applaudissements répétés saluent cette adresse ainsi que la réponse fort goûtée de M. de Molinari et l’allocution très fine du curé Labelle. L’un des échevins propose alors de consigner sur le registre des procès-verbaux du conseil municipal l’adresse qui vient d’être lue. « Pas d’opposition ? — Adopté à l’unanimité. » Puis la séance est levée et l’assistance se répand dans les salles et les galeries de l’hôtel de ville.

Peu après cette cérémonie, arrive le général Middleton, escorté de son état-major, et le maire souhaite aussi la bienvenue, dans un des salons, au vainqueur de Riel, récemment arrivé du Nord-Ouest. Singulier contraste, pour ceux qui n’ont pas l’habitude de la coexistence d’une autre race, avec laquelle il faut vivre en bonne intelligence.

Fondé, le 17 mai 1642, par M. de Maisonneuve, sous le nom de Ville-Marie, Montréal est, après Port-Royal en Acadie, Québec et les Trois Rivières, la plus ancienne cité canadienne. Dans le Nord-Amérique, trois autres villes, Orange (Albany), New-York et Boston, ont seules la priorité sur Montréal. Cette dernière est aujourd’hui la plus importante cité du Canada.

Lors du recensement de 1881, elle possédait 140,747 habitants dont 78,684 Français et 57,933 Anglo-Saxons. On estime actuellement sa population à 180,000 âmes[1], résultant de l’accroissement normal et de l’annexion à la ville de quelques faubourgs. L’élément anglais, autrefois prépondérant dans les conseils de la cité, comme dans la population, décroît de jour en jour. Le maire est d’origine française, ainsi que la majorité du conseil de ville.

Mais, si la race anglaise est en minorité comme population, elle possède toujours l’influence que donnent la fortune et une situation acquise depuis un siècle. Les grandes maisons industrielles et commerciales, les principaux établissements de crédit, les compagnies de chemins de fer sont entre des mains anglaises. Et si la race française, c’est-à-dire la race vaincue et pauvre, a pu, au prix de mille efforts, se faire une place dans la société, dans le commerce et dans la finance, il s’en faut encore de beaucoup qu’elle soit arrivée à la part d’influence à laquelle son importance lui donne droit. Sans négliger la qualité,

  1. Plus de 200,000 aujourd’hui.