Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/110

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rayonnait. Jasmin n’osait lever les yeux : peut-être craignait-il que la grande dame n’y pût voir passer sa propre image.

— Buguet, vous êtes un parfait jardinier, dit-elle. Vous méritez mieux que de travailler pour les petites gens de Melun. Je songerai à vous. En attendant faites pour moi, si vous le pouvez, éclore les roses en avril !

Mme d’Étioles rit d’un rire perlé qui s’égrena dans le cœur de Jasmin. Elle recommanda à Martine :

— Que le fleuriste soit bien traité !

Martine conduisit Buguet aux cuisines. Le chef, en débrochant des poulets de grain, veillait à ce qu’un plumeur d’oie ne gâtât la parure d’un paon qui gisait sur le tablier du rustre, les pattes raidies, l’aigrette penchée, affalé dans son royal manteau où brillaient mille yeux d’orgueil que n’avait pu ternir la mort.

— C’est dommage, dit Jasmin, de tuer si bel oiseau.

— Le dommage est qu’il sera dur, répondit le cuisinier ; grâce au printemps précoce de cette année le paon s’est déjà accouplé. Ça rend la chair coriace.

L’heure du repas des valets sonna. Martine installa Jasmin près d’elle à table. Les laquais, les marmitons s’assirent. Parmi ces derniers se trouvait, vis-à-vis de Martine, un grand maigre, aux yeux vagues