Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/162

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— La ville me pèse, dit-il. Je suis trop fait à l’existence des châteaux.

Dès neuf heures, il entraîna Buguet dans une rôtisserie, où il allait chaque soir. L’enseigne représentait un soleil d’or aux lourds rayons entouré de raisins. On avait fini de manger. La salle sentait la sauce épanchée et la lie de vin. Agathon serra la main au rôtisseur, un gros homme qui lui remplit jusqu’au bord un gobelet, ainsi qu’à Jasmin. Le marmiton de la Pompadour s’empara d’un pilon de dinde qui refroidissait sur un plat et le plongea dans le sabot plein de sel accroché à la cheminée. Il le dévora.

— Je ne puis manger ma propre cuisine, dit-il. J’aime mieux celle des autres.

Il s’assit à côté de Jasmin et lui demanda :

— Aimez-vous vraiment votre femme ?

— Plaisante question ! Je ne l’eusse point épousée si elle m’avait été indifférente.

— Tiens ! C’est qu’à la noce vous aviez l’air distrait, si loin de la mariée !

— Vous avez mal vu.

— Ah ! J’ai pu me tromper, répliqua humblement le cuisinier. L’homme n’est point infaillible. Puis le jour de la noce le marié ne se trouve pas dans la même situation que les autres jours de sa vie. Il est en proie à certaines tentations. Son âme est