Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/195

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Une lumière diamantine caressait les murs du château ; au ciel tendre un nuage d’un blanc pâle pénétré d’azur s’allongeait vers le zénith, comme un voile qu’on aurait levé.

— Enfin ! s’écria Jasmin.

Ses fleurs brillaient épanouies. Ah ! ce qu’il avait attendu l’éclosion ! Sous les nuits étoilées, que de fois il avait écouté les plantes qui, poussant dans le silence, écartaient quelque miette de terre, un brin de paille, une feuille morte ! Elles produisaient un bruit imperceptible, mais le jardinier en saisissait la musique. Il guettait les levées dans les plates-bandes, les premiers mouvements quand le zéphyr passait. Dès qu’un bouton apparaissait, Jasmin était heureux comme le père qui voit s’ouvrir les yeux de son enfant. Les pivoines sortirent du sol pareilles à des nichées d’oiseaux pourpres, les tulipes en cornets verts. De fins boutons fusèrent aux touffes de narcisses. Les iris érigèrent parmi les poignards de leurs feuilles leurs flammes d’abord encloses d’une enveloppe livide. Les ancolies ailées s’apprêtèrent à voler sur les tiges.

Maintenant tout frémissait. De la terrasse des orangers jusqu’au bord de la Seine, la côte se couvrait de corbeilles où l’or et l’argent des alyses, les centaurées légères, la multitude douce ou révoltée des pavots s’embrasaient. Les auricules mêlées aux primevères posaient des bijoux clairs sur