avait cueilli des œillets rouges et en coupait la partie herbeuse. Deux cruches de grès pleines d’eau-de-vie s’alignaient sur un dressoir à côté de lui, avec du sucre royal, de la cannelle fine, du macis, de la coriandre et des clous de girofle.
Buguet vint chercher du vin blanc.
— Ah ! te voilà, Piedfin ! Tu prépares une chose qui sent bon !
— C’est du rossoli.
— Elle est bonne, ta drogue ?
— Le rossoli fortifie le cœur, ranime la mémoire, préserve de la malignité en temps de peste.
Agathon coupait avec vivacité les œillets comme s’il eût ressenti du plaisir à plonger un couteau dans une chair quelconque :
— Assieds-toi, dit-il à Jasmin.
Buguet s’installa. Le défroqué sortit de sa poche un petit calendrier au chiffre de la Pompadour :
— Il est de l’an dernier. Mme de Pompadour le tint plusieurs mois sur sa poitrine. Le veux-tu ?
Jasmin saisit le calendrier, puis il hésita :
— Je ne sais pas si je dois l’accepter.
— Oh ! les choses qui appartiennent à notre maîtresse sont un peu à nous.
— Pourquoi me fais-tu des cadeaux ? Tu as eu avec Martine l’autre jour une querelle qui doit…
— Mince affaire ! Histoire de femmes ! Colères de femmes !