Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/259

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— Tante Laïde, interrompit doucement Martine, nous sommes assez de deux pour compter notre fortune. Là-dessus, laissons dormir la mère.

Elle sortit en affectant de marcher sur la pointe des pieds. Jasmin et Laïde la suivirent.

Dehors une rumeur attira leur attention. Des villageois arrivaient aux nouvelles. Cancri le cordonnier portait sur sa tête frisée et grisonnante un des paquets de Jasmin. Euphémin Gourbillon suivait, le dos courbé sous une manne assez légère : il se déchargea de son fardeau, mais son échine ne se redressa point. Le joyeux dévot avait un nez rouge, les yeux éraillés, les joues bourgeonnées. Il souhaita le bon retour aux Buguet d’un air triste. Nicole Sansonnet vint. À un de ses bras devenus trop courts, elle tenait un panier rond où bâillaient des poissons sortant du vivier. Elle les apportait pour se faire une entrée.

— À Paris on n’en mange pas d’aussi frais, dit-elle. Mais à Bellevue ça doit être un plaisir ! On les engraisse bien sûr ! Aussi vous devez être difficiles ! Mais si vous nous restez il faudra vous réhabituer aux petits poissons et aux petites gens !

— Ce n’est pas pour toi que tu parles, riposta Martine. Tes rotondités font honneur à ta marchandise !

Nicole minauda en serrant les lèvres. Un sale propos de Gourbillon la fit pouffer d’un large rire édenté,