Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/288

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le jour pointait Buguet se souvenait et disait en hochant la tête :

— C’est fini ! Tout est fini !

En août 1792, l’écho des canons qui avait tonné à travers les Tuileries parvint à Boissise. Buguet trembla pour les beaux arbres et les statues. Au mois de septembre, Règneauciel arriva chez le jardinier.

— On en a massacré des centaines ! s’écria-t-il.

— Des centaines ? demanda Jasmin anxieux.

— Des aristocrates !

Règneauciel se pencha pour regarder Buguet d’un air menaçant :

— Et des suspects !

Règneauciel désigna le portrait de la Pompadour d’un doigt farouche :

— Si celle-là eût vécu, on l’aurait massacrée !

Il cracha sur la Belle Jardinière et partit.

Buguet essaya de courir sur les pas du garçon. Ses mains se levaient pour étrangler l’insolent. Celui-ci, déjà loin, sifflait, le nez en l’air.

Le vieillard suffoqué s’appuya sur le coin de sa table. Puis il prit un coquemar plein d’eau, se hissa d’un mouvement caduc sur une chaise et lava le cadre. Buguet fut heureux de se trouver tout près de la figure au clair regard, au chapeau gaillardement posé sur l’oreille gauche. D’ordinaire ses yeux faibles la voyaient à travers un brouillard.