Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/48

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ce moment. Pour cet amoureux des fleurs, peut-il être plus attirant objet que cette grande dame ? Mme d’Étioles paraît au jardinier sortie du plus odorant promenoir d’orangers, d’un cabinet de gardénias. Le garçon se penche vers le sol, comme les autres vendangeurs, mais quand il relève la tête il la sent pleine de gloire : le décor encombré de rustres, qui semblent traire les vignes, se mue pour lui en parterre de sourires ailés. La Seine devient le fleuve complaisant : elle doit mener Jasmin vers il ne sait quelle cour où Mme d’Étioles trônerait comme la statue d’or qui se dresse au fond des grands bassins de Vaux-Pralin, où chaque année Buguet va tailler les tilleuls et façonner le labyrinthe.

À onze heures, Jasmin et Gillot descendent ; ils rencontrent la tante qui porte un pâté de grives, mis au four dès patro-minette. Eux-mêmes reviennent de la cave du tanneur, une cave naturelle creusée dans le tuf : ils sont chargés de grosses bouteilles cachetées de cire rouge ; Gillot en lève une, le sang des grappes flambe dans le verre comme sous la peau des grains et paraît heureux de revivre au soleil.

Les vendangeurs s’assoient à l’ombre d’une charrette. La mère Gillot entame le pâté, tandis que Martine distribue les miches.

— Arrivez, les enfants ! crie la soubrette.