Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

elle était malade, il interrompait vingt fois son travail pour la voir et lui prodiguait des caresses sur le front, des poignées de mains qui guérissaient mieux Martine que les potions de sa marraine. En été Buguet menait son amoureuse en barque et cueillait dans les estuaires de la Seine de petites parnassies blanches qu’il jetait autour d’elle ; alors il la regardait en ramant lentement : il semblait à la fillette que son promis l’enlevait très loin, à l’horizon bleu, pour lui apprendre des choses nouvelles et douces. Et un jour n’avait-il pas fait jurer Martine de ne prêter l’oreille à aucun propos galant ? C’était dans la grange de Gosset, au moment de la moisson ; les yeux de Jasmin brillaient étrangement dans son visage hâlé ; les amoureux étaient seuls. Martine crut qu’il allait la prendre : elle ne se serait point défendue.

— Ah ! oui il m’aime et un pareil amour ne s’en va pas ainsi !

La soubrette se désolait au milieu des ténèbres. Le silence de la nuit pesait sur sa poitrine. Elle songea à Mme d’Étioles, qui dormait sous des courtines de soie, comme une fée au repos.

— Ce qu’elle vous retourne un homme ! se dit Martine. Sait-on ce qui peut arriver avec des femmes pareilles ! Elle a ébloui un roi !

Il fallait se méfier ! Mais que faire ? Ah ! tout d’abord quitter Étioles, ôter à Jasmin l’occasion d’y venir,