Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/71

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tous les jardins fruitiers et potagers du Roy édités à Paris chez Claude Barbin, sur le second, perron de la Sainte Chapelle, avec privilège de Sa Majesté, avaient été donnés au père de Jasmin par un prince. On admirait en tête du premier tome un beau portrait gravé de M. de La Quintinye : avec son rabat de dentelles, son abondante perruque, sa grande figure ovale au nez impérieux, il paraissait vraiment noble. Chaque fois que Jasmin ouvrait le livre il regrettait de ne pas avoir pareil maître : il se voyait avec lui contournant un boulingrin d’herbe verte et courte à la façon anglaise ; ils allaient béquiller dans une caisse d’oranger, tracer la ligne d’une avenue ou diriger des pêchers en espalier sur des treillis d’échalas taillés dans l’érable, le long des murs où paradaient des vases de marbre. À défaut du maître, Jasmin se contentait des livres. Il se promenait ravi dans le plan du jardin potager du Roi, à Versailles, errait en idée de la figuerie au parterre de fraises, s’arrêtant sous la voûte où l’on serre les racines, les artichauts et les choux-fleurs pendant l’hiver ; il longeait la prunelaye, marquait la place des cerises précoces, des pêches chevreuses.

Alors il tournait les pages et relisait les maximes de jardinage. Il apprenait les manières de soigner depuis les cuisse-madame et les salviatis, qui sont poires d’été, jusqu’aux beurrés, aux bergamotes, qui