Page:Demolder - Le Jardinier de la Pompadour, 1904.djvu/75

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des papillons quittaient. À la vue de Jasmin, elle souriait comme au Roi. Il s’approchait, elle lui offrait ses seins. Une nuit elle lui apparut au milieu de cascades ; c’était une des nymphes en marbre de Vaux-Pralin qui avait pris ses traits : elle s’avançait nue à travers les champignons d’eau, chantant un air très doux.

Tentations du diable ! Buguet est le jouet de chimères !

Il se frappe le front :

— Tu n’as pas le droit de penser à Mme d’Étioles. Tu es fils de paysan, Jasmin !

Le jardinier se croit coupable d’une sorte de sacrilège, d’un attentat amoureux envers Mme d’Étioles. Il n’oserait au soleil soutenir son regard et il la baise et la caresse en pensée ! Ah ! si la terre, la confidente de ses espoirs, voulait le sauver ! S’il pouvait, dans les sillons refroidis, semer les gouttes de son sang pour y faire éclore son délire en fleurs plus rouges que l’œillet, plus charnelles que la grenade ! Mais la terre est sourde, et la terre boirait le sang et ne rendrait pas la paix au cœur de Jasmin !

— Il faut pourtant se faire une raison, dit le fleuriste.

Mais le peut-il ? Il mourrait s’il devait ne plus revoir Mme d’Étioles. Il vit avec la secrète pensée de la rencontrer encore. La scène de la forêt passe devant ses yeux : il sent toujours le regard changeant