Page:Denikine - La décomposition de l'armée et du pouvoir, 1922.djvu/53

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dans les journaux de province, surtout ceux de l’extrême droite, recommencèrent jusqu’en 1920 (en Crimée).

Cependant, il faut noter que lorsque, dans l’été de 1918, les monarchistes de Kiev poursuivirent une campagne énergique afin de donner un caractère monarchiste à la lutte armée contre le bolchevisme, ils renoncèrent au principe légitimiste pour certains motifs ayant trait aux qualités individuelles des candidats et, entre autres, en ce qui concerne Michel Alexandrovitch, parce qu’il « s’était lié » par un vœu solennel vis-à-vis de l’Assemblée Constituante.

En examinant la situation générale, telle qu’elle était au mois de mars 1917, j’arrive à conclure que la lutte pour conserver le pouvoir entre les mains de l’empereur Nicolas II aurait amené l’anarchie et l’effondrement du front et aurait mal tourné tant pour lui que pour le pays. La régence de Michel Alexandrovitch, par contre, aurait pu être établie sans secousses et avec un succès certain, en venant à bout de quelque résistance. Il aurait été également possible, encore qu’un peu plus difficile, de faire monter sur le trône le grand-duc Michel, à condition qu’il octroyât une Constitution très libérale.

Les membres du Gouvernement Provisoire, ainsi que ceux du Comité de la Douma, (à l’exception de Milioukov et de Goutchkov), terrorisés par le Soviet et la masse ouvrière de Pétrograd, assumèrent une responsabilité historique bien lourde en déterminant le grand-duc à ne pas accepter sur-le-champ le pouvoir suprême.

Il ne s’agit ni de monarchisme ni de dynastie. Ce sont là des questions absolument secondaires. Je ne parle que de la Russie.

Certes, il est difficile de dire dans quelle mesure ce pouvoir aurait été stable et de longue durée, et quelles métamorphoses il aurait subies par la suite ; cependant, s’il avait seulement réussi à conserver l’armée jusqu’à la fin de la guerre, l’histoire ultérieure de l’État russe aurait pu entrer dans la voie de l’évolution et éviter les bouleversements sans précédents qui, actuellement, rendent incertaine la question même de son existence future.

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Le 7 mars, le Gouvernement Provisoire décida de « considérer l’empereur abdicataire Nicolas II et son épouse comme privés de liberté et de les faire conduire à Tsarskoé Sélo ». En ce qui concerne l’impératrice, cette mission avait été confiée au général Kornilov, chose que les monarchistes orthodoxes ne purent lui pardonner, plus tard. Chose étrange : lorsque son arrestation lui eut été notifiée, Alexandra Féodorovna se montra satisfaite de ce qu’elle lui fût annoncée par le glorieux général Kornilov et non par quelque membre du nouveau gouvernement…

À l’égard du tsar, la notification de la décision gouvernementale fut confiée à quatre membres de la Douma.