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La sombre violette et la noire hyacinthe.
Là, sous des pampres verts étendu près d’Amynte,
Je prêterais l’oreille à ses douces chansons,
Ou ma Phyllis de fleurs tresserait des festons.

Ici, ma Lycoris, sont de fertiles plaines ;
Ici sont des bois verts et de claires fontaines ;
À tes côtés ici je coulerais mes jours.
Maintenant, toute en proie à tes folles amours,
Tu vas du cruel Mars affronter la furie.
Puissé-je m’abuser ! bien loin de ta patrie,
Ah, cruelle ! sans moi tu franchis l’Apennin,
Et sa neige éternelle et les glaces du Rhin,
Des frimas rigoureux, ah ! songe à te défendre ;
Que la glace jamais ne blesse un pied si tendre !

Je fuis… Sur les pipeaux qui pleurèrent Daphnis
Je redirai les vers du chantre de Chalcis ;
J’irai dans les forêts, loin des traces humaines,
Sur les arbres naissans je graverai mes peines :
Tous les jours ils croîtront ; vous aussi, mes amours !
Et du Ménale aussi parcourant les détours,
De ses nymphes mes pas suivront la troupe errante,
Et ma meute ceindra les forêts d’Erymanthe.
Je m’élance avec elle à travers les glaçons ;
Dans la forêt bruyante, à la cime des monts,
Il me semble courir et courber l’arc sonore.
Inutile remède au feu qui me dévore ;
L’Amour par nos tourmens ne se peut adoucir !
Adieu, nymphes des bois ! adieu ! vous pouvez fuir ;
Les nymphes, les chansons n’ont plus pour moi de charmes !
Ce dieu serait toujours insensible à mes larmes
Quand j’irais près des monts, dans la Thrace entassés,
De l’Hèbre impétueux boire les flots glacés ;