Page:Depasse - Spuller, 1883.djvu/8

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le hasard vous a mis. Il tient à votre peau. Il fait partie de vous-même, il est vous-même. Ce n’est pas vous qui vivez, c’est votre cadre qui vit pour vous ! Le tableau possédera en vain les couleurs les plus vives et les marques les plus certaines de l’originalité : le grand public qui vote et lit les journaux ne connaît, vous dis-je, que le cadre.

Qu’est-ce que M. Eugène Spuller pour l’immense majorité de l’opinion ? C’est l’ami de M. Gambetta, le séide de M. Gambetta, l’alter ego de M. Gambetta, suivant les expressions variées des partis, mais toujours quelqu’un qui ne vit qu’en M. Gambetta et ne paraît exister que parce que Gambetta existe… C’est là M. Spuller, hélas ! Il faut dire maintenant c’était, car il a perdu son ami, celui par lequel il semblait être, et il est demeuré debout dans ce grand deuil, étonnamment calme au milieu de ce désert immense dont il a dû avoir l’impression soudaine et profonde. Il n’a plus eu d’autre appui que sa valeur propre, sa conscience et son patriotisme, et il s’est trouvé que c’était assez.

Cette amitié inaltérable de vingt années qui a uni Gambetta et Spuller, cette intimité sans