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par les lois de l’époque, chacun vengeait soi-même ses injures, et, de la sorte, toute querelle amenait une prise d’armes. Monté sur son vigoureux destrier[1], défendu par son bouclier et sa bonne cuirasse d’acier trempé, le chevalier était pour ainsi dire invulnérable ; il avait pour armes offensives la lance, l’épée la hache, la masse d’armes[2] et le poignard. Tour à tour, les adversaires allaient porter la flamme et la dévastation dans leurs domaines réciproques, au désespoir des pauvres paysans qui seuls souffraient de la lutte ; le seigneur, en effet, enfermé dans son imprenable forteresse, s’y trouvait en parfaite sécurité. — Le fléau des guerres privées était si désastreux que les évêques essayèrent d’y porter remède. La trève-Dieu fut établie au XIe siècle : il y eut défense, sous peine d’excommunication, de faire la guerre privée à certains endroits et à certaines époques, par exemple du mercredi soir au lundi matin, du cinquantième jour avant Pâques au cinquantième jour après la même fête, etc. Même, en 1082, l’évêque de Liège, Henri de Verdun, établit le Tribunal de la Paix pour punir les violateurs de la trève-Dieu. Toutefois le mal ne disparut qu’au XIVe siècle.

b) Brigandage. — Longtemps aussi, des seigneurs fidèles aux coutumes barbares se livrèrent au brigandage : ils s’embusquaient dans les bois, le long des routes, assaillaient et dévalisaient les marchands des villes qui se rendaient aux foires. Il fallut sévir avec rigueur pour mettre à la raison ces pillards. Le comte de Flandre Baudouin à la Hache fit pendre un jour dans son château de Wynendael, dix chevaliers de famille illustre qui avaient détroussé des marchands allant à la foire de Thourout. Un autre jour, le sire Pierre d’Oostcamp, pour avoir enlevé deux vaches à une pauvre femme des champs, fut jeté dans une chaudière d’eau bouillante, vêtu, éperonné et l’épée encore ceinte. Mais parfois, les châtelains, du haut de leurs donjons, bravaient impunément la colère des comtes.

c) Chasse. — En temps de paix, les seigneurs se livraient avec passion au plaisir de la chasse. À cheval, précédés d’une meute[3] nombreuse de chiens bien dres-

  1. Destrier : cheval de bataille.
  2. Masse d’armes : espèce de massue.
  3. Meute : troupe de chiens courants dressés pour la chasse.