Page:Deraismes - A bon chat bon rat.djvu/44

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OCTAVE, à part.

Eh mais ! nous conjuguons assez bien le verbe mentir. Qu’importe ? elle est adorable !

ANTOINETTE.

Si nous reprenions la discussion commencée. Le mauvais temps nous en accorde tout le loisir. L’eau et le grand air ont dû vous suggérer des idées nouvelles.

OCTAVE

Vous avez raison, madame, oui, des idées nouvelles, car si la pluie féconde la terre, il arrive aussi qu’elle peut féconder le cerveau d’un homme.

ANTOINETTE, à part.

Déjà ! c’est un peu tôt. (Haut.) Vous me surprenez beaucoup.

OCTAVE

Êtes-vous réellement aussi surprise que vous le dites ?

ANTOINETTE.

Pourquoi ce doute ? Je ne mens jamais.

OCTAVE, à part.

Oui, je m’en suis aperçu tout à l’heure (Haut.) Ne croyez-vous pas, madame, qu’il existe une grande différence entre ce qu’on affecte de paraître en certaines circonstances, et ce qu’on est en réalité ; les pensées les plus secrètes de l’âme ne se vulgariseraient-elles pas en se divulgant ?

ANTOINETTE.

Je vous prie de vous expliquer ; ce que vous me dites là est d’une obscurité inintelligible.

OCTAVE

Tenez, madame, vous me croirez si vous voulez, mais je viens de rétrograder de dix ans. Oui, tout à l’heure, après ce repas improvisé, mais charmant, lorsque je suis sorti et que mon œil s’est promené sur cette vaste mer, sur cet horizon