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dans l’humanité

Dès que l’enfant a l’âge de seize ans commencés, le père ne peut le faire enfermer que par voie de réquisition, c’est-à-dire que, cette fois, le président dudit tribunal, après en avoir conféré avec le procureur du gouvernement, délivre ou refuse l’ordre d’arrestation. La détention peut aller jusqu’à six mois, c’est ce qu’on nomme la voie de réquisition. Mais, comme la paternité exerce beaucoup de prestige, la loi obtempère généralement à ses vœux.

On m’objectera que la mère peut s’opposer aux rigueurs du père ; car l’article 372 dit que l’enfant reste sous l’autorité de ses père et mère jusqu’à sa majorité. Oui, seulement cet article n’est qu’une formule polie et sans effet. L’article 373 nous édifie tout aussitôt et en détermine le vrai sens : le père seul exerce cette autorité durant le mariage. C’est clair. Les auteurs ont donné comme motif explicatif, que la puissance paternelle ne peut souffrir de partage. L’argument paraît bizarre.

Donc, cette mère qui a joué le principal rôle dans cette naissance, cette mère qui, à aucun instant et dans aucune circonstance, ne peut douter une seconde de sa maternité, supériorité incontestable sur le père — la paternité n’étant qu’un acte de foi, une preuve de confiance donnée à la fidélité d’une femme — cette mère qui a porté neuf mois ce petit être dans son sein, qui a senti se manifester en elle les premiers phénomènes de cette vie, cette mère qui l’a formé de sa propre chair, de son sang, qui l’a fait respirer de sa propre respiration, qui a fusionné son existence avec la sienne, qui l’a mis au monde au péril de ses jours, qui l’a allaité de son lait, qui a satisfait à toutes les exigences de sa première enfance, cette mère non seulement ne peut pas transmettre sa nationalité ni son nom au fruit de ses entrailles, mais encore elle devra